Cinéma

Le Routard – Une comédie géographique en demi-teinte signée Philippe Mechelen

Un cinéaste de l’itinéraire comique

À force de tracer ses chemins dans les marges de la comédie populaire, Philippe Mechelen, souvent accompagné de Julien Hervé, s’est imposé comme un artisan discret mais influent du rire à la française. Scénariste de l’inénarrable Les Tuche et co-auteur de diverses excursions humoristiques (Alibi.com, Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu), Mechelen signe ici un projet qui porte en étendard un titre aussi chargé de symbolique que de marketing : Le Routard.

Ce n’est pas une simple fiction, c’est un film adossé à une marque culturelle, une institution du voyage alternatif. Et le réalisateur semble bien en avoir conscience : il en tire un film-voyage, une sorte de périple initiatique où l’identité personnelle se construit dans l’altérité géographique.

Une intrigue cousue sur la route

Yann Tatin (interprété par Hakim Jemili) est un antihéros moderne : trentenaire désabusé, sans repères, sans expériences de voyage, et encore moins de vocation. Lorsqu’il apprend que le Guide du Routard recherche un testeur pour valider des adresses, il saisit l’opportunité… en oubliant de mentionner qu’il n’a jamais quitté le pays. Direction : Marrakech, 40 adresses à valider en 5 jours. S’ensuit une série de mésaventures, de quiproquos, et de rencontres absurdes, censées lui permettre de grandir — et à nous de rire.

Mais si l’on accepte de se laisser porter, c’est bien parce que la carte postale est léchée. Les décors marocains sont filmés avec une élégance parfois trop calibrée, flirtant avec l’esthétique publicitaire. Cela ravira les amateurs de lumière chaude et d’arches orientales, tout en posant une question récurrente : où s’arrête le cinéma, où commence la promotion ?

Des comédiens qui tentent d’embrayer

Hakim Jemili, humoriste issu du stand-up, livre une prestation sincère, même si son jeu reste encore un peu uniforme. Il s’épuise parfois à faire exister un personnage plus subi que construit, plus emporté par les situations que moteur de celles-ci.

À ses côtés, Michel Blanc, dans un rôle secondaire de médecin lunaire, parvient à extraire un peu de vérité douce-amère. Un adieu discret, mais digne, pour l’un des derniers visages de la grande époque du Splendid. Christian Clavier, en rédacteur en chef stressé, rejoue son éternel numéro de Français râleur, avec une mécanique bien huilée, mais sans véritable surprise.

Le Routard – Une comédie géographique en demi-teinte signée Philippe Mechelen

Le reste du casting — Manon Azem, Fred Testot, Medi Sadoun, Elsa Zylberstein, Alice Taglioni — assure sans fausse note. Mais on sent une direction d’acteurs soucieuse de rythme plus que de nuances.

Une comédie calibrée, au bord du routardage commercial

Le film ne manque pas de rythme, et certains dialogues font mouche. Mais derrière la légèreté apparente pointe une forme de standardisation du rire : schémas éprouvés, rebondissements attendus, comique de répétition sans réelle audace. On devine que Mechelen voulait signer une fable douce sur la peur du départ, sur ces adultes immobiles à l’heure du “tout mouvement”. Mais cette intention est souvent étouffée sous le vernis promotionnel, comme si le film lui-même avait peur de sortir de sa zone de confort.

En sortant de la salle : sourire léger, souvenir fugace

Le spectateur quitte la salle avec une impression douce-amère. Il a souri, parfois ri, rarement été surpris. Le Routard est une comédie bien faite, bien montée, bien jouée — mais trop bien balisée. Il lui manque ce souffle, cette sortie de route, ce moment d’égarement qui fait d’un film une trace durable.

En somme, une carte postale agréable. Mais qui finit, comme souvent, au fond d’un tiroir.e.

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